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La fin des stationnements gênants grâce à l’Intelligence Artificielle ?

Photo de @VeloSec (X)

Hier, nous avons assisté à la conférence de presse organisée pour la RESTITUTION DES EXPÉRIMENTATIONS INNOVANTES EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ, en présence de Monsieur Anthony Borré, Monsieur Gael Nofri, Madame Véronique Borré et Monsieur Jean-Luc Gagliolo.

Parmi les différentes mesures dévoilées lors de cet événement, celle qui intéresse de plus prés les usagers du vélo était l’expérimentation d’un système d’intelligence artificielle destiné à détecter les stationnements très gênants sur neuf secteurs de la Ville de Nice, notamment les nouvelles pistes cyclables situées dans les rues du Congrès, de la Buffa, Dante, et de l’avenue Durante.

Mais comment fonctionne concrètement ce dispositif ? En cas de stationnement illégal sur la zone expérimentée pendant plus d’une minute, une alarme retentit au poste opérateur du Centre de Supervision Urbain (CSU). La scène est immédiatement diffusée en direct à l’écran, avec possibilité de relecture.

L’opérateur procède ensuite à une vérification pour s’assurer que l’infraction est bien caractérisée. Si tel est le cas, il engage, avec discernement, la vidéo-verbalisation du contrevenant (entraînant une amende de 135 €). En cas de stationnement prolongé du contrevenant, l’opérateur peut faire appel à un équipage de la police municipale pour procéder à l’enlèvement du véhicule.

Il est important de souligner que ce système n’est pas une automatisation de la vidéoverbalisation. Il s’agit d’un système d’alerte conçu pour appuyer le travail de la Police Municipale de la Ville de Nice.

Pour aller plus loin: https://www.bfmtv.com/cote-d-azur/nice-les-voitures-garees-sur-des-pistes-cyclables-verbalisees-grace-a-l-intelligence-artificielle_AV-202212020666.html

Le bilan

Selon les chiffres, on observe en moyenne 33 détections par jour, tous véhicules confondus y compris les scooters, ce qui équivaut à près de 1000 détections par mois.

Au cours de l’année 2023 (chiffres arrêtés au 30 septembre), 3093 contrevenants auraient été sanctionnés pour stationnement sur une piste cyclable, dont 1932 grâce à l’utilisation de la vidéoverbalisation.

Comment lire ce bilan ?

L’examen de ce bilan s’avère délicat compte tenu du manque de données exhaustives. Nous nous excusons par avance si nos conclusions ne peuvent être aussi précises que souhaité, mais nous devons composer avec les informations qui nous sont disponibles.

Notre première interrogation porte sur le fait que si le système a généré 9 000 alertes en 2023 (soit 1 000 par mois de janvier à septembre), le nombre de verbalisations effectives, représentant 21%, semble relativement faible. Cela nous amène à nous questionner sur la nature des 79 % restants. Nous nous interrogeons sur l’amplitude de ce fameux « discernement » évoqué par Monsieur Anthony Borré. S’agit-il uniquement d’une juste tolérance envers les personnes âgées et à mobilité réduite, comme il l’a mentionné à plusieurs reprises, ou englobe-t-il d’autres éléments ?

Nous émettons également des doutes quant à l’efficacité de ce dispositif pour détecter les deux-roues motorisés qui empruntent les pistes cyclables, et nous espérons que Monsieur Borre pourra apporter des éclaircissements à ce sujet.

Il semble que le système puisse identifier les scooters et les motos qui circulent sur les pistes cyclables, et non seulement ceux qui s’y garent. Cette pratique dangereuse est de plus en plus répandue au fil du temps, et il est désormais rare de ne pas se retrouver face à un scooter sur une piste cyclable, en particulier aux heures de pointe. Il est indéniable que ces situations ne sont pas agréables et que les interactions avec ces usagers ne sont pas toujours aisées ni constructives.

Il est essentiel de faire passer un message clair en sanctionnant ces contrevenants comme il est fait avec les cyclistes qui empruntent les voies du tramway.

Cependant, nous nous interrogeons sur le fonctionnement du système dans de tels cas. Une moto empruntant une piste cyclable ne le fait que pendant quelques secondes, en tout cas, moins d’une minute, ce qui est nécessaire pour déclencher une alerte par caméra. Étant donné le nombre élevé de telles infractions, nous avons de sérieux doutes quant à la possibilité de sanctionner efficacement ces délinquants.

Et maintenant ?

La ville de Nice a l’intention de déployer et de renforcer ce système, qui s’est révélé efficace, à l’ensemble de la municipalité. Toutefois, la décision finale repose désormais entre les mains de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés).

À ce sujet, il convient de se demander s’il est judicieux de la part de Monsieur le Maire Christian Estrosi de proposer la dissolution de cette « institution poussiéreuse […] jugée par certains comme dépassée », compte tenu des défis que pose actuellement un dialogue parfois difficile.

Voir: https://www.bfmtv.com/cote-d-azur/replay-emissions/azur-politiques/nice-christian-estrosi-demande-la-dissolution-de-la-cnil_VN-202310190843.html

Notre position

Il est indéniable que ce dispositif revêt une importance fondamentale dans une ville telle que Nice, où les incivilités sont monnaie courante et demeurent souvent impunies. L’idée qu’un policier municipal puisse être posté sur chaque piste cyclable ou passage piéton relève de l’utopie. C’est précisément là que ce type de système entre en jeu, déchargeant les policiers municipaux de cette tâche pour leur permettre de se concentrer sur d’autres problématiques nécessitant une attention plus soutenue.

Il convient également de ne pas sous-estimer l’importance de la présence visible de la police municipale à Nice. Cela a un impact considérable sur la qualité de vie de ses habitants. Pendant trop longtemps, notre société a été sous l’emprise de la dictature de la voiture, et la Ville de Nice a trop longtemps toléré ces habitudes avec une certaine indulgence. Au cours des dernières décennies, nos villes, conçues à l’origine pour les êtres humains, ont été modelées autour de l’automobile.

Les conséquences néfastes sont évidentes pour toute et tous ( ou pas?) : un espace public largement accaparé par les véhicules motorisés, que ce soit sous forme de routes ou de stationnements, une augmentation alarmante de la mortalité parmi les usagers les plus vulnérables, des trajets domicile-travail de plus en plus longs, des commerces de proximité en difficulté face aux grandes surfaces en périphérie urbaine, une détérioration de la santé due à une activité physique presque inexistante, une dégradation de la qualité de l’air, des enfants incapables de jouer dehors ou de se déplacer en toute sécurité…

Nous espérons vivement que la CNIL donnera son approbation pour généraliser ce dispositif, et nous souhaitons que le système évolue pour détecter un plus grand nombre d’infractions qui ne concernent pas que les pistes cyclables mais la totalité de l’espace public:

  • Arrêt dans un SAS vélo : amende forfaitaire de 135 € (en cas de feu rouge, 35€ si vert) et possibilité de verbalisation du conducteur pour non-respect de l’arrêt imposé au feu rouge.
  • Arrêt sur un passage piéton : amende forfaitaire de 135 €.
  • Arrêt sur une bande cyclable : amende forfaitaire de 135 €.
  • Stationnement sur un trottoir : amende forfaitaire de 135 €.

Ce système représente un pas essentiel vers une ville plus agréable, plus sécurisée et à taille humaine.

Et pour les passioné.e.s de photographie…

Voici un « Best Of » gentiment fourni par @VéloSec

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